Cambodge - Actualités
Spécial Cambodge par le journal "Le Monde" | AFP | Reuters | N.Y. Times  | Wash Post/AP | Bangkok Post | Yahoo  | BBC News Special report: Cambodia elections - history in context, profiles of leaders, related stories.
"Hearings" américains sur le Cambodge

Social, Environnement et culture | Politique intérieure | Relations internationales | archives 98-99

 
Social, Environnement et Culture

En Pacific 231, un périple à travers le temps dans le sud du Cambodge (AFP, 8/2/2000)
La petite ville de Kampot n'avait pas vu ça depuis des lustres: une locomotive à vapeur d'un autre âge, une Pacific 231, construite en France dans les années 30, qui annonce son arrivée à grands coups de sifflets et de volutes de fumée blanche. La vénérable motrice et ses six wagons se sont ébranlés le matin même de la gare de crépi jaune de Phnom Penh pour parcourir les 166 kilomètres de rail, souvent en piteux état, qui relient le sud du royaume.Comme une revanche du passé sur trois décennies de guerre qui ont ravagé le Cambodge et, notamment, son réseau ferroviaire. A la gare, les voyageurs se sont vu remettre des billets datant du "Sangkum Reastr Niyum", la première "ère Sihanouk", dans les années 50 et 60, une époque de paix, de relative prospérité et de stabilité parlementaire. Un certain "âge d'or" dont la vision nostalgique est renforcée par les terribles épreuves qui suivirent. A bord du train, 80 passagers, en majorité des hommes d'affaires, diplomates et journalistes de la région, venus découvrir en rail et à vapeur les provinces méridionales de Kandal, Takéo et Kampot. A 30 km/heure maximum. "Je pense que cette première pourra permettre d'ouvrir d'autres opportunités au tourisme dans la région, et aussi de donner un petit coup de pouce au rail", explique l'organisateur du voyage, Philippe Decaux, producteur de télévision à Bangkok et routier du Cambodge. "Je voulais faire découvrir autre chose du Cambodge que les sempiternels temples d'Angkor. L'idée du train est un prétexte, mais un prétexte qui plaît", dit-il. Sur la motrice, les cheminots, tous francophones du fait de leur formation, s'occupent à alimenter la chaudière en bois, à surveiller la pression et le niveau d'eau, mais aussi à scruter la voie contre d'éventuels obstacles et autres déformations du rail. "Nous avons remis la locomotive en état avec les dernières pièces détachées françaises, mais les revues techniques ont disparu sous les Khmers Rouges", explique Reth Bun, directeur-adjoint des Chemins de Fer Royaux du Cambodge, chargé de l'exploitation. Ne manquent au convoi ni le wagon royal, au charme suranné, transformé en bar pour l'occasion, ni l'ancienne voiture blindée, devenu wagon-restaurant.
Mise en service dans les années 40, la Pacific 231 a traversé l'histoire tragique du Cambodge, y compris la dictature polpotiste
(1975-79) et, jusque dans les années 80, la guerre civile qui a suivi. Entre 1979 et 1996, les chemins de fer ont été la cible répétée des embuscades de la guérilla kmère rouge qui ont tué 712 voyageurs, 49 cheminots et 68 soldats, selon les autorités.
C'est au km 142, en direction de Kampot, que trois touristes occidentaux, dont le Français Jean-Michel Braquet, ont été kidnappés en 1994 par des rebelles lors d'un voyage en train avant d'être exécutés.  Un ancien chef de bande khmer rouge, Nuon Paet, a été condamné l'an dernier à perpétuité et un complice présumé, le colonel Chouk Rin, attend en prison d'être jugé.
"Lorsque l'on parle du Cambodge, on pense toujours au génocide, à la guerre, aux mines. Ce voyage offre une vision différente, celui d'un pays en paix, où les gens travaillent et communiquent normalement", plaide Khieu Kanharith, secrétaire d'Etat à l'Information.
Le pays aujourd'hui pacifié, l'idée du tourisme ferroviaire fait son chemin. La Pacific 231 devrait de nouveau siffler à la fin de l'année,
cette fois jusqu'à la station balnéaire de Sihanoukville (sud). Mais il faudrait 200 millions de dollars pour remettre à neuf les 600 kilomètres de voie ferrée, en attendant un grand projet régional de relier par le train la Thaïlande aux pays de l'ancienne Indochine (Cambodge, Vietnam et Laos).

Les fastes d'Angkor ressuscités pour le passage du millénaire (AFP, 30/12/99)
Les fabuleux temples khmers d'Angkor renouent avec leur splendeur passée, comme un haut-lieu de festivités et de danses royales, le temps du passage au nouveau millénaire. Les autorités cambodgiennes misent énormément sur "Angkor 2000" --trois soirées "son et lumière" au coeur des temples-- pour prouver aux touristes du monde entier que l'interminable guerre civile est bien finie. Certes, ce festival artistique, qui culminera au Nouvel An, a été arrangé un peu à la va-vite, avec les moyens du bord, relativement modestes ici, mais là n'est pas le principal souci des organisateurs. "Le plus important est de montrer au monde que le Cambodge est en paix", plaide Pech Soken, le vice-gouverneur de la province de Siem Reap (nord-ouest) qui abrite ce site exceptionnel, première attraction touristique du royaume. "Il est crucial que tout se passe bien pour que le Cambodge devienne une destination touristique de classe internationale", souligne-t-il. Les organisateurs espèrent attirer trois jours durant des dizaines, sinon des centaines, de milliers de touristes, surtout cambodgiens mais aussi étrangers, autour d'un spectacle pyrotechnique qui évoquera les fastes de l'Empire khmer. La reconstitution mobilisera près de 600 danseurs et acteurs dans les ruines d'Angkor Wat. Et, pour une bénédiction bouddhiste, 2.000 bonzes. Des milliers de visiteurs sont déjà sur place depuis quelques jours, nombre de Cambodgiens qui découvrent l'endroit avec émotion et touchent les vénérables pierres pour la première fois.
Le règne multiséculaire (9ème-14ème) des "Rois-Dieux" d'Angkor marque l'apogée de la puissante et brillante civilisation khmère en Asie du Sud-Est.
Peut-être, arguent certains analystes pour expliquer la succession de tragédies qui a bouleversé le royaume, les Cambodgiens ne
se sont-ils jamais remis de la décadence de leur Empire angkorien.
Quoi qu'il en soit, le gouvernement et l'industrie touristique ont parfaitement saisi l'atout potentiel des 1.200 temples khmers
répertoriés sur les 800 km 2 du parc d'Angkor, encore sous-développé.
Le nombre de touristes a déjà doublé en 1999, à près de 100.000 contre 40. 000 l'année précédente. Le gouvernement a d'ailleurs
décidé récemment d'ouvrir Siem Reap à des vols directs de lignes aériennes internationales pour faire de l'ancienne capitale royale
"la locomotive" du tourisme au Cambodge.
"Le Cambodge a compris le bénéfice économique qu'il peut tirer du tourisme de la même façon que la Thaïlande", explique un
employé du Grand Hôtel de Siem Reap. En séduisant plus particulièrement une clientèle haut-de-gamme.
Ce luxueux fleuron de l'époque coloniale, qui appartient aujourd'hui à la chaîne singapourienne Raffles, propose un forfait de 3.000
dollars pour les trois nuits du festival. Les autorités locales ont dû dépensé plus de 50.000 dollars pour embellir la préfecture de Siem Reap, ordinairement assoupie, et les temples des alentours. Notamment pour installer des réverbères le long de la route de l'aéroport et des chemins forestiers qui mènent aux tours d'Angkor Wat. Il n'y a pas si longtemps, deux trois ans, la région des temples était sous la menace sporadique des bandes khmères rouges, un territoire massivement miné.

Au Cambodge, l'enfance de la protection de l'environnement (AP, 17/9/99)
PARC NATIONAL DE VIRACHEY, Cambodge (AP) -- Pendant 30 ans, les jungles cambodgiennes ont été livrées à la folie des hommes et de la guerre. Aujourd'hui, elles vivent leur année zéro en matière de protection de la faune sauvage, notamment dans le nouveau Parc national de Virachey, immense domaine de 330.000 hectares dans le nord-est du pays. Là, des caméras infrarouge ont été installées le long des itinéraires pratiqués par les animaux, dans cette région traversée autrefois par la Piste Ho Chi Minh... En 35 jours, elles ont pris sur le vif 70 photos de 14 espèces animales, dont deux sortes de léopards, un chat sauvage, un singe très rare, plusieurs chiens et cochons sauvages, des daims, ours, civettes... 
Selon l'écologiste Tony Lyman, organisateur du projet réalisé par le Bureau cambodgien de protection de la vie sauvage, sous l'égide du Fonds mondial pour la Nature (WWF), cette diversité prouve qu'en dépit de la guerre, un écosystème préservé a survécu au Cambodge. Car bon nombre de chercheurs pensent que ces forêts, coupées du monde scientifique pendant si longtemps, sont encore le Paradis secret des espèces rares. Principale cible que cette étude veut recenser, le tigre, ``roi'' des espèces en voie de disparition. Pas un seul d'entre eux n'a pourtant imprimé la pellicule... Pas plus que d'éléphants. Les tigres, ``grands animaux, flamboyants et dangereux (...) intéressent les gens. Ils sont donc devenus le symbole de la protection de la vie sauvage'', explique Tony Lyman. Selon lui, il n'en resterait que 200 au Cambodge, mais la première expérience n'incite pas à l'optimisme... Il y a peu, des gardes forestiers de Virachey ont constaté que des mines antipersonnel, utilisées autrefois contre les populations civiles, servaient désormais à tuer les tigres. Cette absence des espèces les plus rares est venue confirmer les pires craintes des écologistes: depuis la fin des combats, le Cambodge est touché par les maux frappant la Thaïlande, la Birmanie, l'Indonésie, la Malaisie... l'abattage illégal d'arbres, et le braconnage d'animaux rares, qui apparaît en plein boom au Cambodge. 
Autre but de l'enquête, le légendaire kouprey (''vache de la forêt''). Autrefois animal national, ce boeuf gris cambodgien a disparu
dans les années 60. Quelques rumeurs de réapparition ont couru depuis, mais la guerre civile avait jusqu'ici empêché toute
vérification... Non loin de là, au Vietnam, cinq ou sept spécimen d'un rhinocéros rarissime et minuscule, cousin du rhinocéros de Java, ont été retrouvés grâce à ces mêmes ``pièges-caméras'' que Tony Lyman apprend désormais aux Cambodgiens à installer. 
Bientôt Lynam cèdera les commandes du projet à ses élèves cambodgiens. Avec à terme la mise au point et le financement d'un
programme de protection des tigres et des autres espèces en voie de disparition... 
Entreprise de longue haleine dans ce pays dévasté: ``Au Cambodge, le système de protection de la nature est dans l'enfance. Pour l'instant, les parcs ne sont que des zones marquées sur une carte'', souligne Tony Lyman. 

Répliquer Angkor Wat: le rêve fou d'un moine cambodgien (AFP, 16/9/99)
Un moine cambodgien a entrepris depuis deux ans un projet fou:ériger presque seul une réplique en dur du temple d'Angkor Wat, le symbole du royaume khmer, près de mille ans après l'original.Le rêve de Ros Sarin s'est matérialisé près de Phnom Penh, à plusieurs centaines de kilomètres du vrai parc d'Angkor. Ici, à Phnom Baset, à trente mètres au-dessus des rizières, s'élèvent les fameuses tours, copies conformes du majestueux monument d'origine."Quand j'ai commencé, on m'a critiqué, on m'a pris pour un cinglé", raconte le bonze sexagénaire."Nous sommes à la fin du 20ème siècle, et je veux que les jeunes Cambodgiens se souviennent du passé et sachent qu'il y a au moins un homme qui continue l'oeuvre millénaire de nos ancêtres d'Angkor", explique-t-il. L'Empire des "rois-dieux" d'Angkor, du 9ème au 14ème siècle, a marqué l'apogée de la civilisation khmère en Asie du Sud-Est. Il en reste aujourd'hui un site grandiose dans la jungle du nord-Cambodge, unique au monde, près de 1.200 temples répertoriés, dont la plupart sont des ruines isolées, à demi enfouies sous la végétation. Au delà, les tours d'Angkor Wat --qui figurent au centre du drapeau national-- sont pour chaque Cambodgien un symbole de grandeur et de stabilité, tout ce que le royaume a manqué depuis trente ans. Peut-être, arguent certains analystes, ce peuple ne s'est-il jamais remis des fastes de l'Empire angkorien qui a dominé la région pendant des siècles avant de sombrer dans la décadence et tomber sous l'influence étrangère. Le nouvel Angkor Wat de Ros Sarin est à bien plus petite échelle que l'original, trois tours au lieu de cinq, et il est fait de ciment ordinaire, pas de pierres. La tâche serait impossible autrement. A la place des bas-reliefs d'"apsaras" (déesses) et de dieux hindouistes de la "période Bayon" (13ème siècle), le moine a gravé sur les murs des scènes de la vie quotidienne contemporaine. "Sur le modèle de l'original, les sculptures de ce temple montrent comment vécurent les gens de la fin du 20ème siècle", souligne-t-il. Si elle a forcément un aspect un peu caricatural, la réplique attire de plus en plus les foules du week-end.
 Pourtant, elle n'est pas non plus un "Disneyland" bouddhiste. C'est un temple actif, avec une vingtaine de moines, hébergés dans un dortoir voisin. Ros Sarin espère que son monument --baptisé Nokor Vimeansour, "le temple paradisiaque du pays"-- fournira des emplois et s'ajoutera au patrimoine artistique cambodgien. Il a mis deux ans à le dessiner et le construire, avec l'aide de 34 ouvriers et pour quelque deux millions de dollars en dons --une bagatelle quand il a fallu des siècles et des milliers d'esclaves pour monter Angkor Wat. Il ne reste à terminer que les grands portails et les ponts pour que son oeuvre soit complète."Mais j'ai aussi des plans pour d'autres temples ici", dit en souriant le bonze devenu architecte.

Les cerfs-volants ne sont plus dans le vent (AFP, 20/8/99)
Proclamant la nécessité de protéger les pelouses d'un piétinement immodéré, les autorités cambodgiennes ont réagi contre un divertissement qu'elles assimilent désormais à un fléau social - les enfants qui jouent au cerf-volant dans les parcs citadins. Des policiers parfois armés chassent ainsi de nombreux enfants des parcs de la capitale et confisquent les cerfs-volants aux marchands, rapporte vendredi le Phnom Penh Post. "On ne peut même pas laisser deux ou trois personnes jouer au cerf-volant dans le parc - il y en aurait subitement 100 ou 200 autres pour les imiter", a dit un agent de la sécurité. "Les Cambodgiens adorent les cerfs-volants parce qu'ils sont si jolis dans le ciel", dit un marchand. "Et puis, ça les détend, car cela n'a rien à avoir avec la politique."

La plus populaire actrice du Cambodge succombe à ses blessures (13/7/99, AP)
Abattue la semaine dernière par des inconnus armés, la plus populaire actrice du Cambodge, Piseth Peaklica, 34 ans, a succombé mardi à ses blessures. L'annonce de sa mort a suscité une forte émotion à Phnom Penh. Le corps de l'actrice a été exposé quelques heures dans l'enceinte de l'école des Beaux-Arts de l'Université de Phnom Penh, où elle avait enseigné le ballet traditionnel cambodgien. Véritable star dans son pays, Mme Peaklica était particulièrement appréciée par le roi Norodom Sihanouk.  Les deux hommes qui l'ont criblée de balles mardi dernier, alors qu'elle faisait son marché dans la capitale, n'ont pas été retrouvés. Plusieurs quotidiens ont avancé que l'assassinat aurait été ordonné par l'épouse jalouse d'un homme politique avec lequel Mme Peaklica avait eu une aventure. Une section spéciale de la police a été créée afin d'enquêter sur cet assassinat qui a affligé toute la population. Mais jusqu'à maintenant, aucun progrès n'a été réalisé. 
 

Politique intérieure

Le Cambodge toujours hanté par le cauchemar khmer rouge (AP, 16/4/2000)
Doucement bercé dans un hamac de tissu, Kim Sean, trois mois, dort tranquillement dans l'après-midi moite de Phnom Penh. Sa grand-mère le surveille d'un oeil, l'autre sur le bâtiment de l'Assemblée nationale.
Toute la famille, venue de la province de Kampong Chan pour réclamer le retour de ses terres, campe sur le trottoir au milieu des détritus. Ils sont nombreux dans le même cas, incapables de survivre dans ce pays appauvri sans leur terre.
A partir de 1975, des millions de Cambodgiens furent déracinés pendant les quatre années terribles du régime khmer rouge. S'ensuivirent les années de guerre civile puis de régime communiste, au cours desquelles les petits propriétaires ne recupérèrent aucun de leurs droits. Aujourd'hui, c'est l'heure de la foire d'empoigne pour ces terres, mais les nombreuses plaintes ne sont jamais entendues.
Alors que l'on commémore ce lundi 17 avril l'entrée, il y a 25 ans, de l'armée khmère rouge dans Phnom Penh, les Cambodgiens de tous âges, revigorés par les récentes élections démocratiques et un nouveau souffle de liberté, commencent à parler. Des problèmes d'aujourd'hui, mais aussi des crimes du passé.
A l'hôtel Juliana, on discute publiquement, des heures durant, pour savoir comment et où les anciens chefs du régime de Pol Pot devront être jugés, pour le calvaire qu'ils infligèrent à tout un peuple, ces centaines de milliers de morts dans les camps de travail, les centres de torture, les campagnes, les villes...
Nut Kan s'empare du micro et hurle: ''l'ampleur des crimes des Khmers rouges est plus grand que la planète!''. L'exorcisme collectif dure toute la matinée.
Non loin de là, Och Chan se faufile à petits pas au milieu du magma de mobylettes et vélos le long du boulevard Sisowath Quay. Elle est seule au monde. A 76 ans, elle a déjà vécu deux fois plus longtemps que la moyenne nationale de l'espérance de vie, mais elle a perdu toute sa famille sous le régime de Pol Pot. Elle mendie désormais pour survivre auprès des touristes étrangers. Les Khmers rouges? La seule chose qu'elle puisse dire est: ''j'ai peur qu'ils reviennent''.
Avec la paix, les Cambodgiens recommencent à penser au-delà de la survie. On parle d'avenir, mais beaucoup ne peuvent oublier le passé.
Assis sur une marche du temple de Bayon, près de Siem Reap, Sonc pose une fois de plus l'éternelle question sans réponse posée par des centaines de milliers d'autres: ''Pourquoi les Khmers rouges m'ont-ils pris mon fils?''. Enrôlé par les rebelles, il est mort en 1974, avant la victoire khmère. Le reste de la famille a survécu, ayant eu la chance d'être de pauvres paysans, ossature de la révolution maoïste selon Pol Pot, non-corrompus par l'Occident et ses valeurs.
A Siem Reap, Van Theal, huit ans, vêtu du même uniforme d'école usé qui est son seul vêtement, sort de la bicoque de carton où ils vivent à six. A quelques mètres de là se construit encore un nouvel hôtel pour touristes. Sok Pheat, la mère de Van, regarde le chantier et soupire. ''Cette terre était à nous, mais le gouvernement est venu et nous a dit de partir''.
Angkor Vat est le plus grand complexe religieux de la planète. Ses 415 kilomètres-carrés et ses innombrables temples sont l'âme du Cambodge et le coeur battant de son industrie touristique, maintenant que la paix est revenue.
Mais le Cambodge est couvert d'autres lieux de prière. Plus récents. A Phnom Sompov, près de Battambang, Hang Set le moine bouddhiste, a installé ce temple fait de crânes et d'os, consacré au souvenir des victimes de la terreur khmère rouge. Il n'avait que 14 ans lorsque les hommes noirs arrivèrent dans son petit village près de la frontière vietnamienne. Sa mère succomba rapidement, le reste de la famille éparpillée dans les camps de travail.
A Battambang, seconde ville du pays, les ''intellectuels'' furent transférés à Phnom Sompov. Après avoir subi des interrogatoires dans les grottes qui portent encore les traces de sang, ils étaient emmenés au bord d'une fosse. Ils mouraient la gorge tranchée ou le crâne écrasé, racontent les survivants.
Phnom Sompov est l'un des derniers ''champs de la mort'' que l'on peut encore visiter. Bon nombre d'entre eux ont été rasés, nettoyés. Ici, les touristes en short filment au caméscope ce lieu de mort.
Constraste. Dans le nord-ouest, près de la frontière thaïe, l'ancien bastion khmer rouge de Païlin est devenu le haut lieu du jeu et de la prostitution. Ces maux anti-révolutionnaires condamnés par Pol Pot.
Sur la route numéro-10 qui mène à Païlin, rouillent des chars soviétiques T-54, détruits en 1994 pendant l'une des dernières batailles contre la guérilla khmère rouge, comme les spectres qui hantent toujours le Cambodge d'aujourd'hui.

Le roi Sihanouk prêt à témoigner à tout procès des Khmers rouges (AP, 10/4/2000)
Le roi Norodom Sihanouk du Cambodge a fait savoir lundi qu'il était disposé à témoigner devant tout tribunal spécial chargé de juger l'ancienne direction khmer rouge pour génocide, que cette instance soit cambodgienne ou placée sous l'égide des Nations unies. La veille, le chef de l'opposition Sam Rainsy avait annoncé, à l'issue d'une rencontre avec le monarque, que Norodom Sihanouk soutenait la création d'un tribunal onusien qui serait chargé de ce procès. Sans démentir les propos de M. Rainsy, le roi a tenu à préciser dans un communiqué qu'il se tenait également à la disposition d'un tribunal national, au cas où le Cambodge refuserait de céder le contrôle de cette instance à l'ONU. ''Je rencontrerai la cour de mon plein gré afin de dire à la nation et au monde la vérité sur ma relation avec les Khmers rouges'', a souligné le roi Sihanouk, qui est âgé de 77 ans. 

Procès Khmers Rouges : Hun Sen repousse les avances de l'ONU (AFP, 7/1/2000)
 Le Cambodge refuse d'aller négocier au siège de l'ONU à New York les modalités du procès des anciens chefs khmers rouges, un procès historique qu'il veut organiser le plus rapidement possible suivant sa propre formule.Vendredi, le Premier ministre Hun Sen a opposé une fin de non-recevoir à la proposition des Nations unies de continuer à discuter à New York de l'organisation de la cour spéciale chargée de juger les complices de Pol Pot. L'ONU n'est pas satisfaite du projet de tribunal cambodgien qui, selon elle, ne répond pas aux "normes internationales de justice". Elle a invité un représentant du gouvernement de Phnom Penh à venir "dès que possible" à New York pour poursuivre les discussions."Nous n'avons pas l'intention d'envoyer une délégation pour discuter avec quiconque", a rétorqué M. Hun Sen. "Et s'il y a des gens qui souhaitent nous parler, ils peuvent venir à Phnom Penh", a suggéré le Premier ministre devant des journalistes à l'occasion du 21e anniversaire de la chute de la dictature khmère rouge (1975-79). Le gouvernement de Phnom Penh est déterminé à juger les affidés de Pol Pot, le chef historique des Khmers Rouges décédé en avril 1998, devant un tribunal local "à caractère international" dans les prochains mois. Avec ou sans l'expertise et le financement de l'ONU. Selon des sources diplomatiques à Phnom Penh, le Premier ministre souhaite que le procès commence symboliquement le 17 avril, date anniversaire de l'arrivée des Khmers Rouges au pouvoir à Phnom Penh. Le cabinet a déjà entériné le projet de loi instaurant ce tribunal spécial --le premier de ce type au Cambodge-- et doit le présenter la
semaine prochaine au parlement. Depuis des mois, et en dépit des avancées de la justice internationale, le Cambodge objecte de sa souveraineté pour s'opposer à ce qu'il considère comme une mainmise onusienne sur le procès du génocide polpotiste. M. Hun Sen est d'autant moins bien disposé à l'égard de l'ONU qu'il lui reproche d'avoir permis aux représentants des Khmers
Rouges de conserver le siège du Cambodge à New York pendant des années après la chute de Pol Pot et la découverte des
"champs de la mort". Le régime du "Kampuchéa démocratique", sous la férule de Pol Pot, est tenu pour responsable de la mort de près de deux millions de Cambodgiens, selon les historiens. L'ONU souhaite que les anciens hiérarques polpotistes comparaissent devant une cour composée en majorité de juges étrangers, afin que soient "garanties les règles internationales de justice". Une proposition inacceptable aux yeux de Phnom Penh."La porte est toujours ouverte à des juges, des procureurs et des experts juridiques étrangers, mais nous ne pouvons pas retourner en arrière et changer la formule", insiste M. Hun Sen.Selon la formule retenue par Phnom Penh, les juges cambodgiens seront majoritaires à chaque étape du procès. Toute décision,
néanmoins, devra recueillir l'assentiment d'au moins un juge étranger. Le projet gouvernemental a été élaboré parallèlement à des consultations avec des experts juridiques de "pays amis" (France, Inde et Russie).
Il s'inspirerait aussi d'une formule de compromis avancée par les Etats-Unis qui ont, par ailleurs, exhorté Phnom Penh à faire preuve de "souplesse" et à trouver un accord avec l'ONU. Les organisations de défense des droits de l'homme et l'opposition cambodgienne critiquent le projet de loi gouvernemental qui, estiment-elles, est loin de garantir l'impartialité de la procédure judiciaire. L'une des questions les plus épineuses est de savoir qui des survivants de la hiérarchie khmère rouge, presque tous en liberté, sera traduit en justice. Le procès est censé s'en tenir aux "hauts dirigeants" de la dictature polpotiste.Deux dignitaires khmers rouges, le chef de guerre Ta Mok et le tortionnaire Kang Kek Ieu, plus connu sous le nom de "Deuch", attendent en prison d'être jugés. Ils sont les seuls, à ce jour, à être inculpés de génocide.

Le gouvernement cambodgien veut clore le chapitre khmer rouge (AFP, 24/12/99)
Le gouvernement cambodgien est déterminé à clore le plus vite possible le chapitre du génocide khmer rouge, l'un des épisodes les plus brutaux du siècle, tout seul s'il n'obtient pas le soutien de l'ONU. Pour ce faire, le cabinet a entériné vendredi le projet de loi instaurant un tribunal spécial --cambodgien, mais à "caractère international", selon la formule de Phnom Penh--, le premier du genre, pour juger les anciens complices de Pol Pot. La copie du projet de loi a déjà été transmise, lundi, aux Nations unies à New York, mais les autorités de Phnom Penh sont prêtes à se passer de l'aval onusien. Le Premier ministre Hun Sen a d'ailleurs annoncé vendredi que son gouvernement couvrirait lui-même les frais du procès au cas où l'ONU répugnerait à approuver et financer la procédure. "Ce procès ne doit pas s'appuyer sur des finances de l'ONU : le Cambodge est responsable de ses propres juges et procureurs (...) et, ce faisant nous pouvons éviter d'internationaliser le procès," a expliqué le Premier ministre. Depuis des mois, et en dépit des progrès de la justice internationale, le Cambodge objecte de sa souveraineté pour s'opposer à une
mainmise de l'ONU sur le tribunal chargé de châtier les anciens Khmers Rouges. Il organisera son procès du génocide polpotiste "avec ou sans la participation de l'ONU". Avec ou sans l'expertise de juges étrangers. "Jusqu'à présent, nous n'avons pas été informés de la venue de l'ONU, mais nous conclurons ce chapitre (khmer rouge) parce que le gouvernement a bien d'autres devoirs à assumer", a répété le ministre d'Etat Sok An, responsable du dossier. Les discussions avec l'ONU, délicates, ont buté jusqu'à présent sur la composition du tribunal. L'ONU souhaitait que les anciens chefs polpotistes comparaissent devant une cour composée en majorité de juges étrangers, afin que soient "garanties les règles internationales de justice". Mais le gouvernement cambodgien a repoussé cette demande, au nom de la "souveraineté nationale", et a revendiqué la majorité des membres du tribunal. Selon une formule de compromis, les juges cambodgiens seront majoritaires à chaque étape du procès. Toute décision, toutefois, devra recueillir l'assentiment d'au moins un juge étranger. La question de loin la plus épineuse est celle de savoir qui des survivants de la hiérarchie khmère rouge sera traduit en justice. Le régime du "Kampuchéa démocratique", sous la férule de Pol Pot (décédé l'an dernier), est tenu pour responsable de la mort de près de 2 millions de Cambodgiens entre 1975 et 1979, selon les historiens. Le procès doit s'en tenir aux "hauts dirigeants" de la dictature polpotiste et couvrira les crimes commis au regard des lois cambodgiennes et des conventions internationales. Deux dignitaires khmers rouges, le chef de guerre Ta Mok et le tortionnaire Kang Kek Ieu, plus connu sous le nom de Deuch, attendent en prison d'être jugés. Ils ont été inculpés de génocide. Hun Sen n'a pas exclu que d'autres affidés de Pol Pot --parmi lesquels éventuellement Nuon Chea, ex-numéro deux, et Khieu
Samphan, qui se sont ralliés au gouvernement il y a un an-- puissent aussi comparaître devant la justice. En revanche, il n'est pas acquis que l'ancien beau-frère de Pol Pot, Ieng Sary, chef de la diplomatie khmère rouge, soit un jour convoqué devant un tribunal. En faisant défection avec ses partisans en 1996, Ieng Sary a porté un coup fatal à la guérilla khmère rouge et rendu un service
inestimable au gouvernement de Phnom Penh. Vainqueur des rebelles, le Premier ministre Hun Sen a d'ores et déjà averti que le procès devrait concilier "le besoin de rendre justice avec la nécessité impérieuse de réconciliation nationale". Il a dit craindre qu'un procès des Khmers Rouges ne rallume la guerre civile dans un Cambodge tout juste pacifié.

Cambodge: aucun rôle actif pour l'ONU dans le procès des Khmers rouges, affirme Hun Sen (AP, 9/10/99)
Les Nations unies ne joueront aucun rôle actif dans le procès pour génocide des anciens chefs Khmers rouges, a déclaré samedi le Premier ministre cambodgien Hun Sen. ``Le Cambodge est obligé d'organiser le procès des dirigeants Khmers rouges, mais (...) nous ne voulons pas qu'une majorité des juges soient étrangers. La majorité doit être cambodgienne'', a-t-il dit à la télévision en se disant partisan seulement de la présence de conseillers onusiens. Alors que l'ONU n'avait pas réagi dans l'immédiat, Hun Sen avait récemment proposé trois options: une majorité de juges cambodgiens, une assistance technique onusienne pour un procès 100% cambodgien ou aucune participation de l'ONU. Les discussions entre les deux parties bloquent depuis un mois. 

Cambodge/Khmers Rouges - La lente quête des historiens par Robert Birsel  (Reuters, 22/8/99)
Plus de vingt ans après le renversement du régime Khmer Rouge par les forces viêtnamiennes, des chercheurs découvrent encore des documents permettant d'établir les responsabilités dans le génocide du peuple cambodgien. "Des pièces nous parviennent tous les jours", indique Craig Etcheson, historien spécialiste du régime polpotiste travaillant au Centre de documentation du Cambodge. "On nous amène des documents et nous continuons quant à nous à fouiller de nouveaux bâtiments, de nouveaux lieux où nous ne sommes pas encore allés", ajoute-t-il. Une équipe de l'Onu doit arriver mercredi à Phnom Penh pour discuter avec le gouvernement cambodgien de l'éventualité d'un procès des anciens dirigeants khmers rouges, dont le régime s'est rendu coupable de la mort de 1,7 million de Cambodgiens dans les "Champs de la mort"entre 1975 et 1979. Dans cette optique, les documents retrouvés par le Centre de documentation pourraient se révéler décisifs. 
Parmi les informations mises au jour ces derniers temps, des documents mettent en cause Ieng Sary, ancien ministre des Affaires étrangères, et sa femme, Ieng Thirith. Tous deux appartenaient au premier cercle du régime. Ieng Sary, qui s'est rallié depuis au gouvernement, affirme n'avoir jamais eu connaissance des massacres. Mais pour Steve Heder, universitaire de l'Ecole des études orientales et africaines de l'Université de Londres, sa défense est contredite par les documents accumulés. "Cette nouvelle série de preuves comprend des télégrammes en provenance des provinces cambodgiennes qui décrivent non seulement les exécutions de prisonniers de guerre viêtnamiens et de civils mais aussi des purges dont je pense qu'Ieng Sary ne peut plus affirmer qu'il n'avait pas connaissance", ajoute-t-il. 

Une délégation de l'ONU se rendra au Cambodge pour discuter de la mise en  place d'un tribunal international (AP, 21/8/99)
Un groupe de juristes des Nations unies va se rendre au Cambodge le 25 août afin de discuter de la mise en place d'un tribunal pénal international chargé de juger les dirigeants khmers rouges, a annoncé vendredi un porte-parole de l'ONU. Le groupe, dirigé par le secrétaire général adjoint aux Affaires juridiques de l'ONU, Ralph Zacklin, s'entretiendra avec le gouvernement des ``aspects légaux et pratiques'' dans le but d'installer un tribunal mixte intégrant le droit cambodgien, a ajouté le porte-parole Manoel Almeida e Silva. Le groupe restera jusqu'au 31 août pour convaincre le Premier minister Hun Sen qui a rejeté mercredi l'idée d'une justice rendue par un panel de juges étrangers. Le Mouvement étudiant pour la démocratie a critiqué l'attitude du Premier ministre, estimant que la justice ne pouvait être rendue aux 1,7 million
de victimes des Khmers rouges devant un tribunal national. Il a également accusé Hun Sen de tourner la justice en dérision. Les détails du plan de l'ONU ne sont pas connus, mais, selon des responsables cambodgiens, il préconise une majorité de juges et de procureurs étrangers. Mais Hun Sen craint que cette solution proposée par Kofi Annan ne fasse fuir les anciens hommes de Pol Pot. 
 

Relations internationales

Visite en Dordogne du major général de la gendarmerie royale du Cambodge (AP, 25/1/2000)
Le major général Sao Sokha, commandant la gendarmerie royale du Cambodge, se trouve en Dordogne pour une visite de trois jours. Arrivé mardi en fin d'après-midi à Périgueux (Dordogne), en provenance de Paris, il a été reçu à sa descente d'avion par Bruno Roussel, directeur de cabinet du préfet, le lieutenant-colonel Serge Morvan, commandant le groupement de gendarmerie de la Dordogne, et le lieutenant-colonel Pierre Durieux, commandant l'école de sous-officiers de gendarmerie de Saint-Astier. En France depuis lundi, le général Sao Sokha, âgé de 38 ans, devait visiter mercredi l'école de Saint-Astier, avant de se rendre dans un autre établissement scolaire de Sarlat jeudi. Sa tournée prendra fin vendredi au Centre technique national de gendarmerie de Rosny-sous-Bois (Seine-Saint-Denis). L'objectif de ce voyage est de s'informer sur le fonctionnement de la gendarmerie en France pour le compte du ministre cambodgien de l'Intérieur. 

France-Cambodge: M. Hun Sen en visite en France du 1er au 3 juin 1999 (AFP, 31/5/99)
 Le Premier ministre cambodgien Hun Sen effectuera une visite de travail à Paris du 1er au 3 juin au cours de laquelle il sera reçu par le président Jacques Chirac et le Premier ministre Lionel Jospin, a annoncé lundi le ministère français des Affaires étrangères.    M. Hun Sen, qui est accompagné du ministre cambodgien des Affaires étrangères Hor Namhong, aura au cours de son séjour un déjeuner de travail avec le ministre délégué à la Coopération Charles Josselin.
   Il s'agit de la première visite en France et en Europe de M. Hun Sen en tant que chef du gouvernement investi le 30 novembre dernier par l'Assemblée nationale issue des élections de 1998.   Elle intervient, souligne le Quai d'Orsay, alors que le Cambodge
vient d'entrer dans l'Association des Nations du Sud-Est Asiatique (ASEAN) et a reçu, lors de la réunion du groupe consultatif de la Banque Mondiale à Tokyo, en février dernier, le plein soutien de la communauté des donateurs. Les engagements annoncés équivalent à 470 millions de dollars.   Les différentes entretiens de M. Hun Sen à Paris, a précisé le porte-parole adjoint du Quai d'Orsay, François Rivasseau, permettront d'évoquer les relations bilatérales "très denses, tant en raison d'une histoire commune et du partage en commun du Français que du soutien constant de notre pays au Cambodge".   "La France, principal donateur aux côtés du Japon, s'efforce, notamment au travers de ses actions de coopération, d'accompagner les efforts de reconstruction et de développement de ce pays dans des secteurs essentiels tels que la consolidation de l'Etat de droit, l'appui à l'enseignement supérieur ou le développement économique et les infrastructures", a ajouté M. Rivasseau.   Les entretiens, a-t-il enfin souligné, "seront aussi l'occasion de rappeler notre condamnation du génocide, la nécessité de lutter contre l'impunité et de juger les principaux responsables khmers rouges".

Mise à jour : avril 2000