La publication mardi 15/12 du rapport
très négatif du chef de la Commission spéciale sur
le désarmement de l'Irak (UNSCOM) a été le déclencheur
de la décision de Washington de lancer des frappes, ont affirmé
les responsables américains.
Dans ce rapport, l'australien Richard
Butler affirmait que l'Irak avait failli à sa promesse de pleinement
coopérer avec l'ONU et
que, dans ces conditions, les inspecteurs
n'étaient plus en mesure de poursuivre leur travail. "Ce rapport
est honnête,
factuel, objectif", a-t-il dit.
"Malheureusement, il est juste de conclure que l'Irak n'a pas tenu sa
promesse de pleinement coopérer."
Le conseiller du président Bill
Clinton pour la sécurité nationale Samuel Berger a reconnu
mercredi que Washington avait eu
"des indications sur les conclusions
de Butler dès dimanche 13/12", soit deux jours avant le secrétaire
général de l'ONU, Kofi Annan. M. Annan et ses collaborateurs
ont été "surpris" par les conclusions beaucoup plus négatives
que prévues par le rapport et s'attendaient à un texte plus
équilibré, ont indiqué des sources onusiennes.
Quelques heures après le lancement
de l'opération ``Renard du désert'' qui pourrait durer plusieurs
jours (le Ramadan doit commencer samedi ou dimanche), les réactions
dans le monde vont du soutien clair aux frappes militaires américano-britanniques
sur l'Irak au soutien nuancé en passant par la colère. Les
Etats-Unis et la Grande-Bretagne ont trouvé très peu d'appuis
à leur intervention militaire conjointe contre l'Irak,leurs alliés
et leurs adversaires appelant quasi-unanimement à la cessation des
bombardements. Parmi les alliés des Etats-Unis, seuls le Japon,
la Nouvelle-Zélande, l'Australie, la Corée du sud, l'espagne
et la Norvège ont manifesté à divers
degrés leur soutien à l'action prise par Londres et Washington
dans la nuit de mercredi à jeudi contre les capacités militaires
irakiennes en matière d'armes de destruction massive.
Par ailleurs, une vague de critiques a accueilli les attaques aériennes,
en particulier du fait de leur caractère unilatéral. Les
réactions jeudi en Asie aux frappes américaines et britanniques
contre l'Irak sont allées de la très ferme condamnation de
la Chine à des expressions de soutien par d'autres pays, mais toujours
avec des marques de grande "préoccupation" au sujet de l'évolution
de la situation.
Dans la plus importante attaque contre
l'Irak depuis la guerre du Golfe en 1991 les Etats-Unis appuyés
de la Grande-Bretagne ont lancé plusieurs centaines de missiles
de croisière contre l'Irak dans l'opération "Renard du désert"
qui devrait durer plusieurs jours.. Voici quelques réactions dans
le monde le 17 décembre 1998. (Sources : AFP 17-18./12/98) |
"Un jour triste pour les Nations Unies
et le monde"
Kofi Annan, a "vivement regretté"
que les efforts diplomatiques pour résoudre pacifiquement la crise
irakienne aient échoué. "C'est un jour triste pour les
Nations unies et le monde entier", a-t-il souligné
L'ancien secrétaire général
des Nations-unies Boutros Boutros-Ghali déplore les frappes
américaines contre
l'Irak et affirme être ``solidaire
du peupe irakien'' dans une interview publiée par ``Le Parisien''
dans son édition de vendredi.
``C'est surtout un jour triste pour
le peuple irakien qui souffre, coincé entre une dictature implacable
et un embargo
inadmissible. Je suis solidaire du
peuple irakien'', réagit Boutros Boutros-Ghali
``J'ai toujours été contre
l'embargo et contre la politique des sanctions. Pour faire céder
Saddam Hussein, il aurait fallu, en
réalité, des sanctions
qui touchent uniquement les gens au pouvoir à Bagdad'', estime-t-il.
Asie
L'Inde a estimé que les raids
sapaient l'autorité du Conseil de Sécurité et a demandé
l'arrêt des frappes. Le Liban, l'Autorité palestinienne,
le Pakistan, l'Iran et la Malaisie les ont également condamnées.
Manifestations anti-américaines
en Malaisie et en Indonésie
Dans la capitale indonésienne,
Djakarta, des étudiants ont manifesté vendredi devant le
bâtiment des Nations-unies.
Une délégation d'une vingtaine
de manifestants a remis une pétition condamnant l'opération
``Renard du désert'' aux
représentants de l'ONU. Les manifestants
demandent également au gouvernement indonésien de rompre
ses relations
diplomatiques avec les Etats-Unis et la
Grande-Bretagne. Jeudi, le gouvernement indonésien avait
appelé à l'arrét des frappes aériennes contre
Bagdad.
En Malaisie, des manifestants pro-gouvernementaux
portraits dessinés de Bill Clinton ont défilé devant
l'ambassade des Etats-Unis. ``Les Etats-Unis sont gouvernés par
le mensonge et la luxure'', et ``Clinton, ne détourne pas
l'attention de ton scandale sexuel'' furent
parmi les principaux slogans d'une vingtaine de manifestants qui ont également
remis une note aux diplomates américains. La délégation
était conduite par Mohd Ali Rustam, le vice-ministre malaisien des
Transports.
La Chine, également membre
permanent du Conseil de sécurité, a elle aussi condamné
l'action américano-britannique. Pékin s'est déclaré
"choqué"
:
"Nous demandons aux Etats-Unis d'interrompre immédiatement son
action militaire contre l'Irak", a déclaré Sun Yuxi,
porte-parole du ministère des Affaires étrangères.
L'ambassadeur de Chine à l'ONU
Qin Huasen, visiblement irrité à sa sortie d'une réunion
du Conseil de sécurité mercredi soir, où il venait
d'apprendre le lancement de l'opération, a estimé qu'il n'y
avait ``absolument aucun prétexte ou excuse pour utiliser la
force contre l'Irak''.
L'Indonésie, le plus grand
pays musulman du monde a appelé les Etats-Unis et l'Irak à
la retenue. ``Nous appelons les parties en conflit de régler
leurs problèmes pacifiquement et par la voie diplomatique'', a
déclaré le ministre des Affaires étrangères
par interim Imron Kotan.
A Tokyo, le secrétaire général
du gouvernement Hiromu Nonaka a souligné que le Japon ``demande
avec force que l'Irak se conforme immédiatement et inconditionnellement
aux résolutions du Conseil de sécurité''.
Le Premier ministre japonais Keizo Obuchi
a exprimé le soutien de son pays à l'opération militaire
déclenchée par les Etats-Unis et la Grande-Bretagne contre
l'Irak et exhorté Bagdad à se conformer aux inspections de
ses armements par les Nations unies. "Cela est profondément regrettable
mais l'Irak a refusé de coopérer avec l'UNSCOM, ce qui a
mené la situation dans l'impasse", a-t-il déclaré
dans un communiqué publié à Hanoï, où
se tient le sommet de l'Association des pays du Sud-Est asiatique (Asean).
Hiromu Nonaka, principal porte-parole du gouvernement japonais, a estimé
que les frappes dureraient quatre jours au plus.
Le Premier ministre australien, John
Howard, a estimé pour sa part que les frappes américaines
et britanniques contre l'Irak étaient inévitables, Bagdad
ayant manqué à ses engagements concernant sa coopération
avec l'Unscom. Le recours à la force est ``regrettable'',
mais Saddam Hussein 'n'a laissé aucune alternative''.
Le gouvernement de Canberra a demandé
aux australiens actuellement en Irak de quitter immédiatement le
pays et a conseillé à ses ressortissants en Israël,
au Koweit et dans les territoires palestiniens de ne pas demeurer dans
ces pays sauf raisons impérieuses.
La Nouvelle-Zélande a soutenu
l'opération sans ambages. Le Premier ministre Jenny Shipley a relevé
que ``des
innocents souffriront des conséquences
(mais) ne pas agir aurait engendré des conséquences encore
plus graves''.
A Manille, le président philippin
Joseph Estrada a lui aussi regretté le recours à la force,
espérant une résolution rapide de la crise pour ``sauver
immédiatement des vies''.
En Afghanistan, les Talibans au pouvoir
ont fermement condamné les raids contre Bagdad. "Cet acte va
à l'encontre des principes et lois internationaux. Cette attaque
a peut-être un lien avec la destitution de Clinton et les Etats-Unis
et la Grande-Bretagne devraient y mettre un terme".
Les Philippines, la Thailande, et Singapour
ont exprimé leurs "regrets" et se sont prononcés contre
l'usage de la force en jugeant "malheureux" les évènements
de la nuit et en exprimant leur "grande préoccupation".
Manille et de Singapour ont appelé
l'Irak à "respecter les résolutions de l'UNSCOM".
Aux Philippines, où un mouvement
indépendantiste du sud du pays a qualifié Bill Clinton de
"meurtrier de l'Islam" et de "plus grand terroriste au monde",
le gouvernement de Manille a indiqué qu'il suivait de près
la situation et préparait, en coordination avec d'autres gouvernements
de la région, l'évacuation possible de ses centaines de milliers
de ressortissants émigrés au moyen-orient.
Sur le plan de la sécurité,
la
Thailande a annoncé des mesures de sécurité spéciales
autour des édifices américains et britanniques à Bangkok.
Les analystes financiers interrogés
à Singapour ne prévoyaient cependant qu'un effet à
court terme de l'attaque contre l'Irak, citant comme plus grand souci
de préoccupation pour les intervenants sur le marché la procédure
de destitution engagée contre Bill Clinton.
Les attaques contre l'Irak ont eu des
effets divers sur les places boursières, faisant remonter
la
bourse de Sydney en raison des perspectives de hausses dans les secteurs
de l'énergie et en particulier du pétrole, et faisant baisser
la bourse de Kuala Lumpur suite aux craintes de débordements
en Malaisie de nouvelles perturbations financières.
Fédération de russie
Le président russe Boris Eltsine
a déclaré que l'intervention, qu'il a jugé "inacceptable",
constituait une grossière violation de la Charte des Nations unies
et qu'elle "portait en germes les conséquences les plus dramatiques"
pour la région du Golfe.
A Madrid où il était en
visite, le ministre russe des Affaires étrangères Igor
Ivanov a demandé une réunion d'urgence du Conseil de
sécurité et a fustigé l'usage de la force qu'il
a considéré comme ``une violation de la Charte des Nations
unies''. ``Aucun pays n'a le droit d'agir seul au nom des Nations unies
et encore moins s'ériger en seul juge pour le monde entier'',
a-t-il souligné.
Les communistes russes ont de leur
côté accusé Washington de "terrorisme" qui pourraient
conduire à une guerre mondiale.
L'Otan et la Russie poursuivent
leur coopération malgré le conflit en Irak
Le Conseil conjoint Otan/Russie s'est
réuni le 18 décembre à Bruxelles, tandis que
des diplomates estimaient que l'Alliance atlantique et Moscou allaient
poursuivre leur coopération en dépit des frappes en Irak,
vivement
dénoncées par la Russie.
La situation en Irak a dominé cette réunion semestrielle
du Conseil conjoint, mais les deux parties considèrent que "la
coopération doit se poursuivre en dépit" du fait que
les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, membres influents de l'Otan, sont
en guerre avec le président irakien Saddam Hussein, a indiqué
un diplomate.
"Nous voudrions que les bombardements
sur l'Irak s'arrêtent immédiatement", mais "nous comprenons
que ce n'est pas l'Otan qui est responsable de ces faits", a, à
cet égard, déclaré l'ambassadeur russe auprès
de l'Alliance Sergueï Kisliak. Le Conseil conjoint, créé
en mai 1997 et qui donne un droit de regard à la Russie sur les
affaires de l'Otan sans droit de veto, doit fonctionner "quelque soit
le temps, bon ou mauvais" et la Russie est d'accord avec cette analyse,
a résumé un diplomate européen. Cette position permet
à la Russie de ne pas s'isoler complètement sur la scène
internationale, notent les observateurs. Outre la décision d'annuler
le déplacement à Bruxelles de son ministre de la Défense
Igor Sergueïev, qui a menacé de revoir le partenariat russe
avec l'Otan si la position de Moscou continuait d'être ignorée,
la Russie a, en effet, rappelé, toujours pour protester contre les
frappes sur l'Irak, ses ambassadeurs en poste à Washington et Londres.
Mais, signe de cette volonté de Moscou de poursuivre des relations
avec l'Otan, le président russe Boris Eltsine s'est borné
à demander à son ministre de la Défense de ne pas
se rendre vendredi à Bruxelles, sans pour autant remettre en cause
le principe de la session du Conseil conjoint.
Résultat, la Russie a été
représentée à cette réunion, initialement convoquée
au niveau des ministres de la Défense, par son
ambassadeur en Belgique Sergueï Kisliak.
Peu de ministres d'ailleurs étaient
présents à la réunion convoquée de longue date.
La Grande-Bretagne et les Etats-Unis étaient représentés
par des hauts responsables de la Défense, tandis que plusieurs autres
pays européens ont chargé leurs
ambassadeurs permanents à l'Otan
de défendre leurs positions.
Une conférence de presse que devaient
initialement donner à l'issue de la réunion le secrétaire
général de l'Alliance Javier
Solana avec le représentant russe
et le ministre de la Défense grec (coprésident en exercice
du Conseil conjoint) a été annulée, a-t-on indiqué
au siège de l'Otan.
"On ne peut pas faire abstraction des
crises, mais chaque crise qui survient ne veut pas dire aussitôt
que l'Otan s'en charge", a expliqué un diplomate. "Nous ne
pouvons pas faire comme s'il ne se passait rien en Irak", a confirmé
Sergueï Kisliak, en espérant que les évènements
actuels ne serviront pas "de base" à la future politique
de l'Occident et de l'Otan. Au cours de la réunion, beaucoup de
pays ont souligné que l'Irak ne faisait pas partie du domaine de
compétence de l'Alliance (la sécurité en Europe).
En se félicitant que la réunion Otan/Russie ait pu se tenir,
chacun a exprimé sa position nationale sans qu'il y ait débat,
selon un diplomate.
A propos de la Bosnie, la Russie s'est
félicitée de la bonne coopération qui existe avec
l'Otan.
"Nous avons constaté qu'en Bosnie,
nous avons fait beaucoup de choses utiles. Le potentiel de nos relations
avec l'Otan est encore grand", a indiqué l'ambassadeur russe auprès
de l'Alliance.
Le projet d'installer une mission militaire
de l'Otan à Moscou est maintenu, ont dit des diplomates. Initialement
prévue pour la fin de l'année, la mise en place de cette
mission ne devrait en définitive intervenir qu'en 1999, en raison
de "problèmes
bureaucratiques", selon des diplomates.
Proche-Orient
Des oulémas s'élèvent
contre une attaque durant le mois de Ramadan
"Evidemment, les Américains
et les Britanniques font fi du Ramadan et des sentiments de plus d'un milliard
de musulmans", a
notamment déclaré
cheikh
Abdel Sabour Chahine, professeur égyptien de sciences islamiques,
contacté par l'AFP.
"Nos dirigeants se borneront, au mieux,
à condamner l'agression, alors qu'il faudrait rompre les relations
diplomatiques avec
Washington et Londres et arrêter
de les approvisionner en pétrole", a-t-il cependant ajouté.
"Les Américains souhaitent frapper
durant le Ramadan. Ils trouvent du plaisir à avilir davantage les
Arabes", affirme pour sa
part un autre ouléma égyptien,
cheikh
Abdel Adhim Dib, professeur à la faculté de théologie
du Qatar.
Selon lui, "les pays arabes ne pourront
pas empêcher une frappe durant le Ramadan, mais ils peuvent à
la rigueur refuser d'accorder des facilités militaires aux Américains".
Cheikh Dib a déploré "la marginalisation des masses arabes,
réduites au silence par leurs dirigeants".
Le même constat est exprimé
par cheikh Ali Qorra Daghi, un irakien professeur à l'Université
du Qatar.
"L'Amérique a réussi
à apprivoiser les peuples arabes", a déclaré M.
Qorra Daghi, estimant qu'"une éventuelle réaction des
masses serait sans effet sur le cours
des événements".
Pour cheikh Yahiya Ismaïl, ouléma
à al-Azhar, la plus prestigieuse institution sunnite d'Egypte,
"l'Amérique
a réussi à arracher l'Irak du corps arabe et islamique".
"L'Irak est devenu un membre sans vie
dans le corps anesthésié de la nation arabe", a-t-il
dit en appelant les Arabes à "secouer leur torpeur".
Cheikh Abderrahman al-Madani, ouléma
syrien notoire résidant en Arabie saoudite, s'est pour sa part
refusé à commenter l'attaque américano-britannique,
se bornant à rappeler que "le Ramadan est le mois de l'entraide
et de la réconciliation entre frères musulmans".
En Arabie saoudite, le quotidien al-Ryad
a
estimé qu'une frappe durant le Ramadan susciterait "au pire,
quelques escarmouches de la part de certains extrémistes islamistes".
Des commentateurs ont raillé Bill
Clinton, qui, selon eux, a bombardé Bagdad pour détourner
l'attention de la procédure de destitution engagée à
son encontre. "Pour Monica Lewinsky, ils avaient frappé
l'Afghanistan et le Soudan. Et maintenant, pour les yeux de Monica, ils
ont frappé Bagdad", s'exclame un commentateur sur Al-Jazira,
chaîne
de télévision par satellite du Qatar. Fin août,
Washington avait procédé à des frappes anti-terroristes
américaines au Soudan et en Afghanistan, accusés de fourbir
leurs armes en vue de l'attaque de sites stratégiques américains.
Israël a choisi la neutralité.
Le Premier ministre Benyamin Nétanyahou a souligné que l'Etat
hébreu entend ``rester en dehors de la dispute, et dans
tous les cas, prendra soin de se défendre si le besoin s'en fait
sentir''. ``Nous n'avons pas l'intention de prendre part à
ce conflit, mais nous nous préparons à toutes les éventualités'',
a t-il déclaré, avant de retrouver son cabinet de sécurité,
et notamment son ministre de la Défense Yitzhak Mordechai et celui
des affaires étrangères Ariel Sharon, pour une réunion
stratégique.
Plusieurs manifestations ont par ailleurs
eu lieu dans les territoires palestiniens, comme à Bethléem,
Hébron, Gaza et Naplouse où 3.000 personnes
ont brûlé des drapeaux américains et crié: ``Mort
à l'Amérique!'' et ``Mort à Clinton!''. Ils étaient
également 3.000 sur le campus de l'université du Caire et
250 sur celui de Beyrouth.
Les Koweitiens s'estiment peu concernés
par l'attaque américano-britannique en cours depuis contre l'Irak,
tout en
reconnaissant qu'ils aimeraient bien voir
le président Saddam Hussein renversé.
Les avions américains et britanniques
basés au Koweit n'ont pas participé aux premiers raids contre
l'Irak, selon l'ambassade des Etats-Unis à Koweit et des responsables
militaires britanniques. Le gouvernement koweitien a pour sa part annoncé
jeudi avoir pris les mesures nécessaires pour "faire face à
toute éventualité et défendre la souveraineté,
la sécurité et la stabilité du pays".
"Ce sont les Etats-Unis et la Grande-Bretagne
qui ont décidé d'attaquer l'Irak, pas le Koweit. C'est différent
de la guerre du Golfe" en 1991, au cours de laquelle une coalition
multinationale conduite par Washington a libéré le Koweit
alors occupé par l'Irak depuis plusieurs mois, dit un résident
koweitien.
Europe
Environ une heure après le début
de l'attaque, la France s'est dissociée des Etats-Unis et
des Britanniques dans un communiqué. "Nous déplorons l'engrenage
qui a conduit à ces frappes américaines dont les conséquences
risquent d'être sévères pour les populations en Irak",
a ensuite déclaré Lionel Jospin, en voyage officiel
au Canada, reprenant les termes du communiqué. Le Quai d'Orsay a
déploré ``l'engrenage qui a conduit aux frappes militaires
américaines contre l'Irak et les graves conséquences humaines
qu'elles pourraient avoir pour la population irakienne''.
réactions
en France et dans
la presse française
La Grande-Bretagne, seul allié
des Etats-Unis à participer à l'attaque contre l'Irak, a
fourni la plus éclatante illustration
du "lien privilégié transatlantique"
que Tony Blair et Bill Clinton ont rétabli comme aux meilleurs temps
du couple conservateur
Thatcher-Reagan.
Dans le quotidien français Le Figaro,
le
Premier ministre britannique répète ainsi que la décision
d'agir a été "prise à regret" et reconnaît
qu'il y aura "des victimes, malgré tous nos efforts". "Nous
avons pris cette initiative parce qu'il faut contrer le danger réel
que pose un tyran", ajoute Tony Blair.
Son ministre de la Défense George
Robertson s'est appliqué de son côté à minimiser
la crise diplomatique ouverte avec la
Russie, qui a rappelé son ambassadeur
à Londres, après celui de Washington.
Cette mesure ne diminue pas le "soutien
international" à l'opération militaire américano-britannique,
a assuré le ministre de la
Défense. "Les Russes veulent
faire un geste, mais ils ont eux-mêmes souscrit très clairement
en février à la résolution (de
l'ONU) qui avertissait des plus graves
conséquences" si l'Irak ne respectait pas ses engagements, a
ajouté M. Robertson, alors
que l'ambassadeur se préparait
à prendre le premier vol pour Moscou.
Robin Cook, le chef de la diplomatie,
et son secrétaire d'Etat Derek Fatchett, chargé du Proche-Orient,
multiplient aussi les efforts pour expliquer la position britannique, avait
indiqué jeudi Downing street.
Chez lui, Tony Blair est assuré
du soutien de toute l'opposition, conservatrice et libérale-démocrate
et de la majeure partie du
parti travailliste, à l'exception
de l'aile gauche du Labour qui a manifesté haut et fort sa désapprobation
jeudi.
Mais quelques journaux s'interogeaient
vendredi matin sur les risques d'isolement de Londres: "cette opération
n'a le soutien
affiché que d'une poignée
de pays et suscite l'opposition de la plupart", notait le Guardian.
Et Tony Blair, qui se veut le plus
européen des Premiers ministres
britanniques, est en train de donner des arguments aux "eurosceptiques
qui estiment que
"Londres devrait s'éloigner
de l'UE" pour signer "un accord transatlantique" avec Washington,
ajoutait le journal.réactions
dans la presse britannique
Pour le ministre autrichien des Affaires
étrangères Wolfgang Schuessel, dont le pays
exerce la présidence tournante de l'UE, Saddam Hussein est responsable
des conséquences de ses actes. Toutefois, il a dit à l'agence
APA préférer des frappes ``limitées dans le temps
et ne visant que des cibles militaires''.
Pour le chef de gouvernement néerlandais
Wim Kok, ces attaques étaient ``inévitables''.
Parlant
de ``défaite de la diplomatie'', il a dit espérer
qu'elles n'affecteront pas le peuple irakien. A Berne, le Département
fédéral des affaires étrangères (DFAE) a exprimé
ses regrets que la crise n'ait pas pu être réglée pacifiquement,
tout en sommant Bagdad de se conformer aux résolutions de l'ONU.
L'Allemagne a regretté le
recours à la force, espérant une issue politique rapide.
A Bonn, le chancelier allemand Gerhard Schroeder a exprimé la ``solidarité''
de l'Allemagne avec ``la communauté internationale et nos alliés
américains et britanniques''. Pour lui, ``l'usage de la force
militaire est la conséquence du refus obstiné de Saddam Hussein
de coopérer avec les inspecteurs en désarmement comme prévu
par les résolutions de l'ONU''.
L'Italie a appelé à
mettre rapidement un terme aux frappes, jugeant qu'elles ne résoudraient
probablement pas la crise.
En revanche, l'Espagne et le Portugal
ont affiché leur soutien à leurs alliés américains
et britanniques.
Afrique
Le gouvernement algérien
a lancé jeudi ``un appel pressant à la cessation immédiate
des opérations militaires contre l'Irak''. Alger considère
dans un communiqué officiel que ``les différends liés
à la mise en oeuvre des résolutions du Conseil de sécurité
doivent être résolus dans le cadre du Conseil de sécurité
et conformément à la légalité internationale''
et non par ``l'usage de la force de manière unilatérale''.
De
son sôté, le sénat algérien a estimé
que les raids de mercredi étaient ``venus approfondir les souffrances
du peuple irakien, déjà frappé par l'embargo qui lui
est imposé depuis 1991''.
Côté sud-africain,
on ne cachait pas sa déception. Le ministre des Affaires étrangères
Alfred Nzo a estimé que la force ne résoudra rien et ne fera
qu'aggraver ``les souffrances du peuple irakien''.
Le secrétaire général
de l'Otan Javier Solana a pour sa part accusé Saddam Hussein
d'être le seul responsable de la situation et l'a pressé de
se conformer aux exigences de l'Onu.
Les Pays-Bas, les Philippines et Oman,
tout en regrettant l'usage de la force ont fait de même.
Canada
``Saddam Hussein s'est attiré
cette crise tout seul'', a souligné le Premier ministre canadien
Jean Chrétien. Son ministre des Affaires étrangères
Lloyd Axworthy a déclaré que le gouvernement approuvait ces
frappes, ajoutant qu'Ottawa n'avait pas étésollicité
pour
une contribution militaire.
Sondage aux Etats-Unis
Pour 30% des Américains, le président
Bill Clinton a choisi la date des frappes militaires contre l'Irak pour
retarder le
vote de la Chambre des Représentants
sur sa destitution, selon un sondage réalisé par ABC News.
Par ailleurs, 58% des personnes interrogées
estiment que Bill Clinton ne devrait pas être destitué, contre
40% qui sont favorables à sa destitution.
Ce sondage a été réalisé
mercredi soir auprès de 510 adultes interrogés après
le début des frappes contre l'Irak, avec une marge d'erreur de 4,5
points.
La communauté arabe américaine
manifeste contre les frappes
"Nous ne voyons pas de raison à
cette réaction des Etats-Unis", a déclaré à
l'AFP Oussama Siblani, responsable de l'Arab
American News, à Dearborn
(Michigan). Il s'agit de "faire diversion" juste avant le vote sur
la destitution du président, selon lui.
Siblani s'est dit très découragé
d'apprendre que, selon les sondages, 73% des Américains étaient
favorables aux frappes contre
l'Irak. Il a dit avoir pourtant reçu
de nombreux courriers électroniques d'Américains qui ne sont
pas d'origine arabe et qui disent
"avoir honte" de l'attaque américano-britannique.
Le Comité américano-arabe
contre la discrimination, basé à Washington, a également
dénoncé les attaques contre l'Irak. "C'est choquant de
voir qu'après huit années de sanctions, qui, de l'aveu même
des agences de l'ONU, ont été responsables de la mort d'au
moins un million de civils irakiens, les Etats-Unis cherchent à
faire plus de morts", a affirmé le comité dans un
communiqué.
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